À l’occasion du mois de la physiothérapie, l’Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec (OPPQ) met en lumière la variété des milieux de soins dans lesquels la physiothérapie peut offrir une aide déterminante aux patients. Entretiens avec des physiothérapeutes et des technologues en physiothérapie qui illustrent à quel point être au bon endroit, au bon moment, fait toute la différence pour la population.
Entretien avec Marjorie Gingras, physiothérapeute au sein d’un groupe de médecine familiale (GMF)
Diplômée en physiothérapie en 1999, Marjorie Gingras a exercé en clinique privée et dans le secteur public. Elle a notamment développé une expertise dans le domaine des problématiques de l’épaule. En 2021, elle a obtenu un diplôme de 3e cycle de l’Université de Montréal en physiothérapie avancée neuro-musculosquelettique. Mme Gingras exerce au GMF Azur en Montérégie.
Quel est le rôle du physiothérapeute dans un GMF?
En GMF, le rôle du physiothérapeute est celui d’un consultant. Je suis sollicitée par les médecins et les infirmières praticiennes spécialisées (IPS) pour évaluer la condition neuro-musculosquelettique et les capacités physiques des patients. Ensuite, je propose au patient un plan d’accompagnement qui inclut conseils et exercices. Mon rôle n’est donc pas de traiter à long terme les 23 000 patients inscrits à notre GMF, mais plutôt de leur donner accès à mon expertise et de les outiller afin qu’ils soient autonomes pour améliorer leur condition et prévenir les récidives.
À quoi ressemble une consultation de physiothérapie en GMF?
La plupart des patients qui sont dirigés vers moi présentent des douleurs persistantes comme des maux de dos, des douleurs au cou, aux épaules, aux genoux, aux hanches, etc. Une fois que j’ai évalué la condition du patient, je lui présente mon diagnostic en physiothérapie et je lui propose une approche d’autogestion adaptée à sa condition. Si nécessaire, je l’oriente vers les bonnes ressources. Par exemple, est-ce qu’il aurait besoin de participer à un programme pour des troubles de l’équilibre? Est-ce qu’il a besoin de se remettre à bouger, de faire de l’aquaforme dans une piscine municipale?
Si le patient a peur de bouger pendant qu’il ressent de la douleur, je lui propose aussi des lectures ou une sélection de ressources Web. Il est essentiel de bien comprendre les besoins d’un patient pour lui donner les bons outils. Un patient qui comprend sa douleur, qui a des objectifs clairs et un plan d’exercices adapté est un patient sur la bonne voie.
Dans quels cas vos collègues du GMF font-ils appel à votre expertise?
Au GMF, notre objectif est d’aider les patients en collaborant entre collègues. Je travaille étroitement avec ces derniers, notamment les médecins et les infirmières praticiennes spécialisées en soins de première ligne. Ainsi, je peux leur suggérer des examens, comme une radiographie, pour éliminer une cause précise. Il m’arrive aussi de discuter avec l’équipe de la pertinence d’un examen. Par exemple, je peux leur conseiller de ne pas prescrire une résonance magnétique de contrôle chez un patient qui ne présente pas de signes inquiétants ou de nouveaux traumatismes.
Il arrive aussi à mes collègues de solliciter mon avis ponctuel pendant qu’ils évaluent un patient dont le problème est de nature musculosquelettique.
Je suis toujours disponible pour partager mes connaissances. Mes collègues savent qu’ils peuvent assister à mes consultations. Je tiens à leur transmettre le plus d’outils et de conseils possible. J’ai d’ailleurs organisé des formations et des webinaires pour les médecins et les IPS qui portaient sur les problèmes de tendons ou les capsulites à l’épaule.
Avez-vous en mémoire un exemple où cette collaboration a fait la différence dans la vie d’un patient?
Je me souviens d’une patiente dans la soixantaine, en forme, qui s’est présentée pour des douleurs persistantes au dos et à un genou, pour lesquelles elle avait déjà reçu des traitements, de la médication et des infiltrations. Lors de mon évaluation, j’ai observé une raideur importante et une perte de mobilité au niveau de la hanche, ce qui m’a amené à penser que son dos et ses genoux devaient compenser. J’ai proposé au médecin d’explorer le problème de hanche et, en effet, nous avons découvert une arthrose de la hanche assez avancée. J’ai suggéré une référence en orthopédie en précisant les informations clés issues de mon évaluation et de la radiographie. Après une consultation chez l’orthopédiste, cette patiente est aujourd’hui en attente d’une prothèse totale de la hanche en chirurgie d’un jour.
Ensemble, nous avons orienté la patiente vers les bons soins et amélioré sa qualité de vie. Voilà la force de la collaboration sur le terrain!
Physiothérapie en GMF: un médecin témoigne
« Il ne fait aucun doute que la présence au GMF d’un expert en physiothérapie bonifie la qualité des soins offerts aux patients au quotidien. Il est impressionnant de constater, tous les jours, que les patients comprennent mieux leur condition musculosquelettique, se sentent impliqués dans le traitement et guérissent plus rapidement de problèmes aigus. Il est dommage qu’une majorité de patients n’ait pas accès d’emblée à la physiothérapie, souvent indiquée en première ligne, dans le système de santé actuel.
La collégialité rend la pratique médicale quotidienne beaucoup plus stimulante, notamment parce qu’elle nous permet de discuter d’un cas le jour même de la consultation. Grâce à des réflexions et des enseignements mutuels, nous améliorons la qualité de nos connaissances et nous précisons le diagnostic pour élaborer le bon plan de traitement. Nous sommes tous gagnants avec une telle approche: le patient d’abord, mais également les soignants. » – Dr Nicolas Wang Vuong Legentil | GMF Azur
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